Quand Jean-Pierre Brouillaud n’est pas sur la route on peut le retrouver se poser dans son village perché de Laboule. En effet c’est en Ardèche qu’il est venu et qu’il revient encore poser ses valises et voir grandir sa fille. JP vit en conscience avec son environnement, il sent, ressent, écoute et enregistre pour connaître, apprécier s’orienter. Chez lui il se déplace sans cane ni aide, monte l’escalier abrupt avec célérité. A le voir on comprend qu’il maîtrise son environnement et qu’il a confiance en sa capacité à faire sans la vue et avec tout le reste. Quand il est arrivé chez moi il a pris ma main pour que je le guide et ça lui a suffi car en repartant il savait déjà ou se trouvaient chaque marche chaque obstacle a contourner et a rejoint seul la voiture de son ami. Pour moi qui n’ai aucun sens de l’orientation c’est épatant.

En février 2016, il publie chez l'éditeur Points Aventure : "Aller voir ailleurs, dans les pas d'un voyageur aveugle". Ce livre est un survol autobiographique avec des récits de voyages depuis la jeunesse de l’auteur quand il perd la vue, sa fuite et sa révolte au travers des années hippies jusqu’à sa maturité ou il découvre enfin l’acceptation de soi , la gratitude l’amour et la paternité. Une aventure humaine riche et ardue, celle d’un homme qui passe de l’oiseau qui croit avoir perdu ses ailes à l’aigle dont le regard intérieur va bien au-delà des apparences des projections et des faux semblants. Sur lui-même il est arrivé a cette belle conclusion « Un homme, quand il est enfin en paix avec lui-même, a, même s’il est aveugle, un regard d’aigle. » Il explique le but de son livre ainsi : « C’est surtout le voyage intérieur  que je veux faire connaître avec ce livre alors j’ai choisi d’alterner des anecdotes légères, des moments drôles, quelques épreuves, j’y ai survolé mon histoire en évitant de m’enfermer dans un aspect particuliers de celle-ci comme la psychologie ou le handicap.» Depuis la publication de son livre Jean Pierre parcours les salons du livre où il anime aussi des conférences comme à Lauzanne ce début Septembre. Il souhaite que son travail inspire et donne envie aux lecteurs d’oser être eux même et d’aller voir ailleurs encore et toujours. On l’a vu aussi cet été rencontrer ses lecteurs Ardéchois à la FNAC d’ Aubenas et dans son village.

« Comment profiter d’un paysage quand on ne le voit pas ? », lui a demandé un jour , son ami le photographe Lilian Vezin. C’est pour répondre à cette question et confronter leurs « regards » que les deux compères décident en 2015 de faire le film d’un voyage, Deux hommes un Regard. Ils partent ensemble au Maroc, Lilian le photographe pour qui la vue est un outil de travail et Jean Pierre pour qui le monde s’appréhende au travers des sons, des mouvements de l’air, des odeurs et de milles petits détails que l’on imagine pas quand on profite de la vision échangent sur leur façon de découvrir le monde. Auteurs de nombreux voyages à vélo et à pied, Lilian Vezin cherche à comprendre quelle folie s’empare de Jean-Pierre Brouillaud quand il quitte tout à 18 ans pour parcourir le monde . Ce documentaire permet aussi de visualiser quelques-unes des escapades mentionnées dans le livre de Jean-Pierre Brouillaud. En 2015 il crée également l’association l’anagramme de la Rose  pour venir en aide aux aveugles d’Afrique et pour promouvoir la différence au travers de films, livres documentaires, évènements culturels etc. Les droits d’auteur du livre et l’argent récolté avec le documentaire sont ainsi reversés à l’association. Attention l’homme bouillonne de projets et entraine du monde dans son sillage, artistes et réalisateurs, l’on ai pas fini d’entendre parler de ce phénomène au grand cœur qui reviendra encore se reposer dans son petit village cévenol.

Article publié dans La tribune d'Ardèche le 15 septembre 2016
  

                                                                                                                   Cécile Bouchon