28 Novembre 2015
1. Faites appel à vos souvenirs : racontez nous la toute première fois que vous avez vu ou rencontré un aveugle ?
J'en ai croisé dans mon enfance et cela m'impressionnait de voir une personne se repérer à l'aide d'une canne blanche. Mais la véritable première rencontre c'est Toi à Lima dans un hôtel pour "gringo con mochila", puis 2 mois plus tard à Rio où j'entendis parler d'un aveugle qui se trouvait dans une autre "casa do estudiante" que celle où j'étais. Je suis parti à ta recherche ... nous avons bu "uma brahma" ... nous sommes allés au Maracana pour voir uma partida décisiva: Flamengo contre Vasco da Gama ... J'étais impressionné par ta détermination, ton courage, ta volonté, ta curiosité...ton expérience de globe-trotter et quand je vois les chemins parcourus depuis plus la culture accumulée, les cultures auxquelles tu t'es frottées..; je suis toujours autant admiratif, respect, chapeau bas Monsieur Brouillaud Jean-Pierre.
2. Que vous évoque la cécité ?
Un handicap difficile à vivre: un univers sans couleur, le noir, une perte de perception de nuances, des reliefs... étant un contemplatif j'imagine souvent cette perte quand je suis en pleine nature. Je ferme les yeux et bien sûr les autres sens sont plus sollicités mais quand je les rouvre je "vois" ce qui me manquerai si je perdais la vue. Mais par dessus tout ce que m'évoque la cécité c'est l'incroyable optimisme, énergie, positivisme qui te caractérisent Jean-Pierre.
3. Racontez-moi la rencontre que vous rêvez de faire avec trois personnes aujourd’hui disparues ?
Léo Ferré, Barbara et mon oncle Gaston qui n'a du être célèbre que dans son village de La Treille (Marseille) où une place porte son nom pour être parti à Buchenwald et y être revenu les pieds devant.
4. Qu’est-ce qui vous manque ?
des gestes, un sourire, des éclats de rire, une voix et ses silences, une connivence, des moments partagés, un parfum, une présence mais... pas tout les jours. Est-ce que ça porte un nom ce beau songe? L'amourtié peut-être?
5. Vous m’invitez à votre table, vous me faites manger quoi ?
Uma lembrança do Brésil onde nos hemos encontrados depois o Perou: uma moqueca do pexe ou alors un plat très, très simple qui ne demande aucune préparation: des pattes à l'huile d'olive et au parmesan accompagnées d'un bon Côte du Rhône rouge (si tu aimes). J'adore et donc ce petit haïku que j'avais écrit à une amoureuse dont je garde encore l'amour en moi :
piatto per due
olio con parmiggiano
pasta romantica!!!
ou cet "Aïl-y-Goût":
tonnell'et vin frais
aïl et huile d'olive
pasta d'amore
6. Vous avez le pouvoir de faire parler un animal, lequel et pourquoi ?
Personnellement je préfère les animaux dans la nature et par ailleurs vivre avec un animal domestique engage : une présence quotidienne, les repas, la propreté, les soins... Alors quel que soit l'animal (même si ma préférence irait au chat) je lui apprendrai le langage des humains pour qu'il soit autonome : faire ses courses notamment.
7.Que regardez-vous en premier chez l’autre ?
Je regarde ce que l'autre me montre : ses yeux, ses lèvres s'il me parle car en prenant de l'âge... j'ai une perte d’acuité auditive... puis ses gestes... ses mains... mais s'il a commencé par me montrer son cœur alors j'écoute avec le mien: je le (la) regarde enfin.
8. Qu’est-ce qui vous fait le plus peur ?
Ce sont mes peurs actuelles qui me font le plus peur elles sont liées aux Théo- fascismes et au techno-capitalisme qui se développent partout : la misère et les violences qu'ils engendre.
9. Où m’emmèneriez-vous en voyage ?
Tu es déjà allé partout, connais-tu un pays où les hommes sont doux si oui tu me le dis et on y va, si non on va au pays de nos mélancolies et on y boit. A la tienne et à la mienne !
10. Que décririez-vous à un aveugle ?
- Tê pour le faire rire: sous le chêne,
oh! belles couleurs d'automne...
une crotte de cheval!
- Pour rire encore: juste sous la lun'(e)
des marins qui dessaoulent
ell'est plein'aussi !!!
- Tê pour les couleurs et les sons: sublimes bouleaux
musiqués par la brise...
douces feuilles d'or
J'écoutais et pensais: que ses arbres sont “doux de la feuille”...
- Tê pour le côté "psyco-comique": cela fait du bien
tant de vach'au pâturag'
un' bonn' terr'-à-pies !
- Tê une nostalgie parfumée: les heures tendres
dans la grange parfumée...
de foins et d'amour
- Tê pour rêver: un arc-en-ciel de lune (en pleine mer): la lune tricot'(e)
dans le rideau de pluie fin'(e)
l'arc de coton gris
- Tê pour la sensuali-thé tartin'et thé chaud
sous la table nos pieds
comme sous la couette.
et pour finir les deux derniers tout frais avec les photos qui vont avec :
Une vision de “faune minérale des calanques”: la tête d'un hippocampe de calcaire se détachait dans le ciel . Posé sur un rocher l'animal marin semblait le monter. et donc un petit haïku :
tête dans le ciel
l'hippocampe de pierre
chevauch'un rocher
Le ciel était couvert d'un duvet de nuages, la mer parcourue de belles ondes. Entre le ciel et la mer les îles Rioux et Plane deux masses sombres environnées de gris et de taches de lumières filtrées par les nuages: sensation paisible de tranquillité, sérénité et donc un petit “Tanka” :
entre ciel et mer
entre cotons et frissons
Rioux et Plane
masses sombres des îles,
douce lumière filtrée...
Ah! oui! qu'est-ce que j'aimerai décrire le plus à un aveugle ?
La démarche d'une femme qui nous aurait dépassés et dont le parfum planerait encore autour de nous...
Jean-pierre le fadoli (qué fa pa d'oli!)
Amoureux de l'inconnu voyageant pour l'Aimer davantage !
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