27 Octobre 2016
Frontières, bornage pour montrer à l’autre qu’il est étranger
Ô douanier servile, mon passeport ne révélera jamais ma véritable identité
Le grand Inca, Atahualpa, ils l’ont tué, mais rien ne les dérangeait.
Paradoxal Pérou, océan Pacifique et terres ensanglantées.
Masqués de religion et de savoir, jadis, les conquistadores
la noire guérilla, aujourd’hui, se prétend sentier lumineux
Derrière les idéaux, toujours du sang versé pour de l’or.
Les Évangiles parlent d’amour, les hommes sont haineux.
La bouée ? Toujours pousser un désir devant soi
En voulant le satisfaire, à son insu le naufragé se relève
Sexe, pisco et marie-juana, mémorable gueule de bois.
Âcre fumée d’eucalyptus, sur les Andes grises un jour neuf se lève.
Autocar, vitre brisée, un col à cinq mille mètres
La neige s’amoncelle sur mes genoux, des croix annoncent les morts
Et si ce que nous appelons le monde n’était que l’écho de notre peur d’être ?
La route est tueuse, au-dessus du ravin veille un condor.
Ayacucho, dès potron-minet, une bombe explose
Remontant de mon enfance, les exilés dans la forêt de Mayne Reid
Ce livre qui m’a tant fait rêver, enfin en actes je l’ose
Demain, un mot pour dire notre cacochyme besoin d’espérer.
Ayahuasca, arborescence de visions iridescentes
En langage chlorophyllien la forêt me crie : l’âme a son nid
Le caïman ne connaît pas le nom du rio où il fainéante
Boue, bottes, treillis, machettes, hamac, Amazonie.
Elle a un corps de cuivre et d’oiseau inquiet la belle Indienne
La vie n’a pas de carte, pourtant nous avons des boussoles
Des yeux partout sur sa peau de vigilance et d’obsidienne
Païtiti, la cité d’or, me dit-elle, est une parabole.
Abstrus rêve de ma mère enterrée dans une jardinière
Nuit d’insomnie dans un bordel baroque sur pilotis branlants
« No señora, je ne paie jamais les choses du sexe », je suis trop fier
Cent ans de solitude, quel roman !
Dix campesinos fusillés au nom de la révolution.
Cris de roc, flore en deuil, faune en fuite
Le silence claque plus fort que les balles qui ont troué leurs fronts
Je dégueule de la bile, je ne peux accuser aucune cuite.
Je suis une graine de poète qui va nulle part
Démesure je t’aime, mais parfois tu me files la trouille
Pourquoi les hommes construisent-ils de partout des remparts ?
Il n’y a pas de princesse dans les citrouilles.
Travail, famille, patrie, je ne veux pas, je ne veux pas
J’ai vingt ans beugle mon passeport
J’aimerais qu’éclatent des bulles de joie sous chacun de mes pas
Crise de malaria sur une paillasse pouilleuse dans une païenne aurore.
Amoureux de l'inconnu voyageant pour l'Aimer davantage !
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