30 Décembre 2016
illustrations de E Denize.
En langage de sensations, mon corps se demande qui a éteint la lumière
Et pelleté cette excrémentielle boue dans mes yeux.
À qui se plaindre, à la génétique, au Diable, à Dieu ?
En fugue vers le nord, dix-sept ans, la nuit, seul, il fait faim froid peur dans ce cimetière.
Mes pensées, mes gestes, mes émotions crient non, non et non.
Ça s’inquiète à l’unisson : quel visage a le coupable, que je le défigure ?
Même si la Meuse n’est pas loin, ma bohême ce n’est plus du Rimbaud ni de la littérature.
Je traquerai le semeur de nuit, de l’Érèbe à l’Empyrée en passant par le Parthénon.
Désolation dedans, dehors, en plein plat pays de Brel,
Mauvais sommeil dans un champ labouré et trempé de rosée,
Mais ce n’est plus une chanson dans la radio. La vraie vie, un jour, est-ce que je vais l’oser ?
La clé, sans doute l’amour : pour l’incarner, vomir avec lucidité tout mon fiel.
Encore larve, j’aspire à une métamorphose,
Demeure l’ennemi, mon aveuglant bouc émissaire,
Un lui sans nom, sans forme, sadique ravisseur de lumière ;
Je commence à me demander si dans ce cauchemar je n’y suis pas un peu pour quelque chose.
Brûlant concert des Rolling Stones, Bruxelles, le manque prend source dans le désir,
Le désir de vouloir autre chose que ce que l’on a,
Mais comment désirer uniquement ce que l’on a
Et faire du manque un instant pacifié sans avenir ?
Le vénéneux aconit né de la bave du Cerbère ne me fait pas peur.
De la lumière, j’ai une si poignante nostalgie,
Pour la retrouver, j’étudierai ou je réécrirai la mythologie.
Si je ne sors pas de mon trou, je meurs.
Je corromprai Charon, traverserai le Styx sans émoi.
Inattendue rencontre d’un vagabond miroir : « aime ton ennemi ».
Mais au fait, mon ennemi, si ce n’était ni Dieu ni Diable, plutôt ma personne endormie,
Cet auto-apitoiement douceâtre qui me laisse imaginer que la vie s’acharne sur moi ?
Insensé, je cherche le sens, Antwerpen, une femme en déroute, un port,
Pas que le sensationnel, mes préférés sens inverses ou sens interdits,
Le sens, l’essence, pour tourner le dos à l’acédie.
Mais qui dira la mauve et impossible soumission devant la mort ?
La Louvière, outrance de la bière, hardiesse de ma main sous sa jupe,
Dans mes couilles le réveil d’un embryonnaire soleil levant,
Blondes arrogances et invitation à voyager sur l’échine du vent,
De tous ces jeux de masques ne pas en être dupe.
Je m’applique en vain à mystifier la torpeur,
Changement de lieu, de lit, de compagnon, de femme,
Dans ma poitrine en désarroi, un effréné joueur de tam-tam.
Mais pour quelle nauséeuse raison inavouable je cultive la peur ?
Si la vie est comme l’écrit Maeterlinck « l’esprit de la matière »,
Comment discriminer entre l’ivraie et le bon grain ?
Dans le juke-box, Cat Stevens, je chantonne son refrain,
Mais moi je n’ai pas rencontré l’égérie, une Patti d’Arbanville à la Louvière.
Je mâche une fétidité de vide ; qu’est-ce qui pourrait bien m’inspirer ?
Pink Floyd m’attend sur la face sombre de la Lune,
À Knokke-le-Zoute, solitaire, j’erre sur la dune,
J’ai du blues dans mes viscères, qu’est-ce que je pourrais désirer ?
Amoureux de l'inconnu voyageant pour l'Aimer davantage !
Voir le profil de Jean-Pierre Brouillaud sur le portail Overblog
Commenter cet article