24 Février 2017
Ma liberté, imposer au monde mon bon vouloir,
Fatalité, subir ce que je ne peux changer,
Maturité, avec ce qui arrive ne plus me sentir étranger.
L’inspiration peut-elle jaillir d’au-delà de notre mémoire ?
Peyotl, barque d’or dans un vertige myrtille de ciel sans fond.
Qui pêche les âmes endormies pour les ramener à la surface ?
Le cactus susurre : « Homme ne te retourne jamais et marche sans laisser de traces,
Regarde avec les yeux de ta peau ; rappelle-toi, l’aveugle est un homme sans horizon. »
Crique sur un rio perdu, jungle en cris et délire de feuillage, pêche, feu, campement.
Fais attention, nomade, le passé a des bottes de sept lieues, es-tu à jour avec ton enfance ?
Diable, Dieu, des projections qui ne disent rien d’autre que peurs, espérances.
Sensation étrange, cette nuit la terre a jubilé en d’inquiétants tremblements.
Pueblos désertés suite à la terreur de la guérilla.
Ce qui fait courir et mourir les hommes : prendre et chercher à avoir raison.
Dominés, dominants, arrêterons-nous un jour tous ces jeux de cons ?
La vraie religion, profit, pouvoir, tu paies cher pour l’apprendre, ô querido Guatemala !
Le temps de Rios Montt, check points en treillis et en armes, gamins de quinze ans,
Le sang noir de la dictature infecte les plaies du quotidien.
« No bueno », me répète en crachant d’indignation devant sa hutte l’ami indien.
Sa femme prépare les tortillas ; sur un vieux poncho nous égrenons du maïs en devisant.
Insomnie dans le hamac accroché à un énorme fromager.
Coatis, toucans et singes hurleurs, les bêtes, la nuit, célèbrent-elles les pyramides de Tikal ?
Peut-être un peu trop d’abus avec le jus d’agaves fermentées, le mezcal.
Ce matin, entre moustiques, cris et alcool, je me sens ravagé.
Vertes flamboyances, aventurines, agates, rubis, je ne verrai jamais les soleils couchants.
Crépuscule sur la lagune : « Le plus bel endroit ? Sans doute celui que je ne connais pas,
Mais, vois-tu, si je l’invente, il passe de vie à trépas. »
Dans la mémoire de la boue du sous-bois s’écrit mon passé en marchant.
Flores, joli nom pour une ville, quatre heures du matin, sonnerie du réveil, je me rendors.
L’autocar qui devait me transporter dérape dans un ravin,
Trente cadavres remontés au bord de la piste. Question d’intuition ou de destin ?
Vie, qu’est-ce qui a voulu que je rate ce rendez-vous avec la mort ?
Abrité sous les feuilles palmées d’un grand kapokier,
L’ami fumeur de pipes tourne les pages du « Popol Vuh », poème épique ;
La blonde fumée ne lui suffit pas, il cherche la clé d’une parole prophétique.
Je pense : le temps des horloges n’invente que des tigres de papier.
Noires grimaces de laves, fumerolles, soufre, le volcan Pacaya danse sous moi avec retenue,
Le quetzal cache son plumage d’émeraude et de rubis dans la verte forêt tropicale.
Fini de jouer les Robinson, je retourne vers la capitale,
Écarlate état d’esprit, ici ou ailleurs c’est partout et nulle part, le voyage continue.
Métissée d’ébène et d’une Espagne altière et colonisatrice,
la salsa éclabousse avec ses diableries de rythmes et ses fruits mûrs de cuivres éclatés,
Tranchante lame sonore jaillissante d’un fourreau argenté.
Cocaïne, sexe, panama, cigare. Chut !... Respect !… Débarque l’impératrice.
Effacer chaque frustration de la veille en se dissolvant dans le miroir neuf du matin.
Un voyageur lucide a écrit sur les murs de l’hôtel : « Les hommes fabriquent leurs cages ».
Vivre, vivre de la même nature que l’océan, au large mais sans rivage.
Même si, éthylique, il titubait devant moi, je ne fouillerais pas dans les poches du destin.
Je passe à côté de la fortune en ouvrant une bouteille de Coca-Cola,
À l’intérieur, un chewing-gum. Si j’avais eu des yeux j’aurais pu inventer un procès.
Les si, les j’aurais pu, les mais… tapageuses impostures ! Au plus vite s’en débarrasser.
Ô gringo, au fond de mon bol de café – signe ou pas signe ? – une cucaracha.
Amoureux de l'inconnu voyageant pour l'Aimer davantage !
Voir le profil de Jean-Pierre Brouillaud sur le portail Overblog
Commenter cet article