29 Octobre 2011
En juin 1983, avec Marie nous arrivons à la frontière américaine en auto-stop, avec peu d’argent et sans réel billet d’avion pour réintégrer l’Europe. Ce sont apparemment des atouts qui devraient jouer contre nous et nous empêcher de pénétrer sur le sol américain. Mais que de prétention à croire que nous savons par avance ce qui va ou pas se faire ?
Nous avons en fait en poche depuis la Colombie une espèce de chèque de 130 dollars qui s’intitule M.C.O., chèque que l’on peut remettre à n’importe quelle compagnie aérienne affiliée à ce système de paiement et ainsi régler une partie ou la totalité d’un vol selon son prix. Mais je sais que cette pauvre avance de 130 dollars sur un hypothétique vol ne fait aucunement office de garantie pour être accueilli sur le sol états-unien, aussi dois-je improviser et faire des tours de passe-passe devant ce douanier pointilleux et soupçonneux. Je ne connais pas la magie mais je sais assez bien moduler mes comportements pour obtenir ce qui me tient à cœur. Alors je sors le fameux M.C.O., je le brandis sous le nez de notre homme, l’agite en clamant avec autorité :
« Mais Sir vous ne connaissez pas ce type de chèque, je suis surpris ! ».
Et j’énonce cela avec une certaine hauteur, l’attitude feinte de ceux qui savent être dans leur bon droit, en ajoutant un soupçon d’attendrissement épicé d’une recherche de complicité consensuelle.
Et comme j’ai bien pris soin de signifier à ce douanier mon « aveuglitude» en l’abordant, je lui secoue sous le nez le document maladroitement et de manière à ce qu’il ne puisse pas trop l’étudier. J’y mets beaucoup d’aplomb et je le fourre prestement dans ma poche en faisant semblant de croire qu’il a non seulement eu tout loisir de l’examiner, mais surtout qu’il est désormais convaincu de ma bonne foi et de mon admissibilité. Et en effet mes effets de manche font impression, notre homme tamponne nos visas.
Nous venons de Colombie en auto-stop à travers Panama, Costa Rica, Nicaragua, Honduras, Guatemala et Mexique et nous allons traverser les Etats-Unis jusqu’au Québec où nous attendent des amis.
Amoureux de l'inconnu voyageant pour l'Aimer davantage !
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